Benoît Fremaux, Directeur des systèmes d’information et de la transformation digitale de la Fnac, vient de recevoir le trophée DSI de l’année 2016, décerné par IT For Business.

Après avoir répondu aux questions de ses pairs, membres de la communauté Atout DSI, sur son engagement au sein du programme Mentorat DSIBenoît Fremaux revient maintenant sur la stratégie Big Data et innovation agile de la Fnac, et nous donne son opinion sur l’approche d’hyper convergence vis-à-vis des grands vendeurs de Cloud et de Big Data

Benoît Fremaux DSI ANNEE 2006 FNAC

 

Question de la communauté Atout DSI

Les projets que vous menez sont au cœur de la transformation digitale de la Fnac, avec une DOSI (Direction Organisation et Systèmes d’Information) devenue en 2015 multicanale. Dans le cadre de votre démarche d’innovation agile vous avez aussi mené en 2015 des tests sur le Big Data, que vous pourriez déployer en 2016. A ce stade du projet, quelles sont pour vous les prochaines étapes ?

Dans le domaine de la data, nous avons construit en 2015 un socle décisionnel unique sur une technologie très performante, qui intègre notamment la possibilité de construire des ‘datalabs’. Cette fonctionnalité permet aux directions métiers d’injecter elles-mêmes des données dans le système décisionnel de l’entreprise pour les exploiter. Très concrètement, la DOSI gère les données ‘officielles’ de l’entreprise de façon très industrielle et offre aux directions métiers la possibilité de venir ajouter leurs propres données (issues de l’internet, de fichiers Excel, etc…) et ainsi mélanger les données ‘officielles’ avec les données ‘autres’ pour leur fournir des rapports ou des analyses.

Cette approche peut s’appliquer pour des sujets ponctuels ou de façon pérenne : les métiers demandent alors une industrialisation de l’intégration des données dans le système décisionnel de l’entreprise. Nous testons cette approche dans de nombreux secteurs de l’entreprise, par exemple l’approvisionnement et la logistique.

Pour le Big data, nous complétons la technologie décisionnelle avec des fonctionnalités mathématiques, que nous testons depuis mi 2015. Les tests se poursuivent et certains sont prometteurs.

Pour bien exploiter toute cette puissance mathématique exceptionnelle, l’entreprise doit se doter de moyens et d’une organisation. Cela nécessite des profils de type data scientists et data analysts, qu’il faut positionner correctement dans l’entreprise. Notre démarche n’est donc pas finalisée, nous nous laissons encore quelques mois de réflexion. Se poser la question des choix technologiques sans se poser la question de l’organisation humaine, c’est comme avoir une Ferrari sans avoir le chauffeur. Cela ne coûte pas trop cher de venir greffer du Big Data sur un système décisionnel, mais sans un chauffeur pour piloter et un mécanicien pour ajuster, on n’en fait rien.

Pour moi, l’innovation agile c’est ne pas hésiter à aller regarder ce qui se passe à l’extérieur, et aller chercher des services packagés offerts par des startups. Certaines startups sont performantes sur des niches. A la Fnac par exemple pour la préconisation de produits sur fnac.com, nous avons décidé d’externaliser ce service et travaillons avec une startup française qui met en œuvre une technologie de type Big Data. Nous avons retenu la même approche pour la modélisation des prix.

C’est important de savoir externaliser certains traitements qui nécessitent des expertises spécifiques, et ne pas hésiter à tester, sans que cela ne nécessite de budget.

 

Question de M. Frédéric Weyant, DSI de Metz Métropole

Frédéric Weyant, DSI de Metz Métropole


« On assiste à une offensive importante des grands du secteurs (Microsoft, Amazon, Google, etc…) pour vendre du CLOUD ou de la BIG DATA. L’Hyper convergence peut-elle constituer une alternative à confier son informatique et ses données aux acteurs majeurs du CLOUD ? »

Je ne considère pas que ce soit la bonne direction, par ce qu’une DSI d’une ville comme Metz ou d’une entreprise comme la Fnac ne représente rien par rapport à la taille de ces entreprises, et on devient dépendant d’une roadmap sur laquelle on a aucun levier d’influence. L’hyper convergence permet d’aller très vite dans le déploiement et la valeur ajoutée, mais une fois déployé, on n’a plus la main sur la vitesse d’évolution et on se retrouve perdu dans un ensemble.

Il ne faut cependant pas hésiter à faire appel à ces sociétés car elles ont les moyens pour faire des solutions évoluées, mais une entreprise a plutôt intérêt à utiliser leurs services sur des fonctionnalités où elle ne se différencie pas de la concurrence. Par exemple dans le cas de la Fnac nous utilisons auprès de grands du secteur des solutions comme Office 365 (dont Skype for business ou le réseau social d’entreprise, …) ou le stockage. Ce n’est pas sur ce type de services que nous allons essayer de nous différencier d’autres acteurs du retail. Dès que l’on veut être sur notre cœur de métier et sur de la différenciation il faut maitriser son destin, et c’est plus difficile en partant avec ces gros acteurs. A l’échelle d’une ville je pense qu’on peut imaginer de choisir du collaboratif, du stockage de données, l’exécution et l’infogérance, mais pas son cœur de métier.

Il est plus intéressant d’avoir une approche d’hyper spécialisation avec des éditeurs sur lesquels on a une capacité d’influence positive. C’est-à-dire des entreprises de taille adaptée à la nôtre (par exemple pour nous dans le retail, des éditeurs comme Generix, Cegid, Meti, …), qui vont nous écouter pour qu’une fonctionnalité soit intégrée dans leurs solutions. Et cela permet plus facilement de travailler avec des entreprises françaises et donc de contribuer à préserver de l’emploi.

D’une façon générale, dans la distribution, peu d’entreprises sont parties sur de l’hyper convergence applicative, mais plutôt sur des approches best of breed, en assemblant des briques, avec des dizaines voire des centaines d’applications, et des flux quotidiens ou hebdomadaires, ce qui donne au global de l’agilité. Quand le marketing et la logistique ont des demandes cela nous donne ainsi plus de souplesse qu’un gros système hyper convergé.

La question à se poser c’est « Si je pars avec une société et je lui confie mon destin, quel poids je représente pour qu’elle m’écoute ? ».

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